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Livres et bibliothèques
"Un foulard pour Djelila", de Amélie Sarn
--> par Alicya Fruit

Un foulard pour Djelila raconte l’histoire de deux sœurs qui voulaient être libres, et qui paieront le prix de cette liberté, chacune à leur façon. Djelila et Sohane ont 17 et 18 ans, ce sont deux jeunes filles qui vivent tranquillement dans la Cité des Lilas avec leur famille. Elles sont musulmanes, mais leurs parents ne leur imposent pas la pratique de la religion.

En grandissant, les jeunes filles ont des désirs d’émancipation contraires. Alors que Sohane trouve son épanouissement dans la religion et décide de porter le foulard pour se sentir en accord avec elle-même, Djelila s’en éloigne et veut vivre une vie de jeune fille moderne, être libre de sortir, de boire avec ses amis, de se vêtir comme elle l’entend. Mais les garçons de la Cité ne l’entendent pas ainsi. Ils désapprouvent son comportement trop libre et la surveillent. Après plusieurs affrontements, Djelila sera brûlée vive dans une cave par l’un de ces jeunes.

L’histoire est racontée rétrospectivement par Sohane. Le temps présent se situe un an après le drame, lors d’une marche en mémoire de la jeune fille brûlée vive. Pendant cette commémoration, Sohane repasse les événements dans sa tête. A l’image de la marche qui mène Sohane jusqu’à la plaque mortuaire de Djelila, son récit se déroule pour mener jusqu’à la mort de la jeune fille. Dès le début, nous sommes prévenus : Djelila est morte. Tout le récit est tendu vers cette fin terrible que nous connaissons à l’avance, sans en savoir les raisons. Notre façon de lire est donc particulière, toutes les situations deviennent signifiantes par rapport à la fin de la jeune fille.

Le thème de la religion est abordé doublement. D’un côté, il y a le thème de l’intégrisme religieux à travers l’histoire de Djelila. L’intégrisme d’un groupe de jeunes de la cité la mènera à sa perte. De l’autre côté, le thème du foulard et plus généralement celui des signes religieux est abordé dans ce livre par le personnage de Sohane. En décidant de porter le foulard, la jeune fille avait pour désir d’être en accord avec sa religion et de choisir la discrétion. L’effet produit par le foulard a été contraire à ses attentes, puisqu’il a été pris comme un signe de provocation et l’a marginalisée.

On pourrait croire que ces deux histoires s’opposent par les choix de vie totalement contraires des deux sœurs, mais en réalité, il s’agit d’un seul et même combat pour les deux jeunes filles : celui de la liberté. Cette même quête est rendue dans le livre par le jeu sur les prénoms des deux sœurs. En effet, le livre s’intitule Un foulard pour Djelila, alors que c’est Sohane qui décide de se couvrir la tête. Ce choix du titre signifie-t-il que Djelila aurait dû elle aussi porter un foulard pour continuer à vivre? Aurait-elle été heureuse ainsi ? Un parallèle peut également être fait avec la réalité. En 2002, une jeune fille de 17 ans, prénommée Sohane a été brûlée vive par un jeune de sa cité, dans les mêmes conditions que Djelila. Tout porte à croire que le choix du prénom de Sohane n’est pas anodin. Par ce jeu sur les prénoms, l’auteur a voulu montrer qu’aujourd’hui, le désir de liberté des jeunes filles des cités n’est pas accepté, et peut se révéler dangereux pour elles. Quelque soit la forme qu’il prend, ce combat est le même pour toutes.

En choisissant ces deux angles de vue sur la vie des filles dans les cités, Amélie Sarn nous montre que ce débat de société est complexe et ne doit pas être perçu comme une globalité. Un livre fort, qui suscite beaucoup de questions et de réflexions sur un thème d’actualité dont on parle beaucoup, mais qui est finalement peu traité dans la fiction jeunesse : les conditions de vie des jeunes filles dans les cités et la place de la religion dans leurs  vies.

Alicya Fruit

Ecrit par cloock, le Lundi 28 Novembre 2005, 21:09 dans la rubrique "Critiques Lille 3".