Le petit se voit donc aimé par autant de papas et de mamans qui mettent un point d'honneur à lui donner une éducation aussi complète que possible. Le petit Etoile, en grandissant, se découvre des pouvoirs extraordinaires, grâce à la demi étoile d'or qu'il porte autour du cou depuis toujours, des pouvoirs capables d'arrêter la caravane en pleine descente, d'allumer une bougie ou de faire tomber la neige…

Et ce n'est pas fini car Etoile le petit cirque, édité chez Delcourt jeunesse, est le début d'un récit prévu en trois tomes. Ce conte –car il s'agit bien d'un conte- est empreint d'amour et de poésie. Cette histoire qui semble hors du temps, aborde pourtant des questions ancrées dans le réel, comme celles de l'apprentissage de la vie ou de la paternité. Un papa analphabète est-il pour autant un mauvais papa ?

Ce récit marie excellemment émotion, humour et poésie : aux délirants "comment vas-tu ? yau de poêle !" s'entremêlent l'amère question "croyez-vous qu'il m'aime ?" et les subtiles formules tel que "l'art est bien long et le temps est court".

Cette galerie de sentiment ne serait pas possible sans les personnages qui entourent Etoile : "Carmen l'équilibriste, Torticoli [la girafe], les frères Willy et Willy cachés sous leur lourd déguisement de cheval clown, Horace l'homme tatoué et sa femme Rose à la barbe bleue, Zingaro le clown, M. Balthazar et ses 21 puces savantes et le géant [muet] Constantin". Ces personnages, aussi charismatiques que complexes, sont décrits avec sobriété par Rascal et représentés par les traits simples, naïfs et efficaces de Peter Elliott. Les deux spécialistes de la littérature jeunesse, qui ont déjà plusieurs fois travaillé ensemble, ont su allier à merveille le texte aux dessins pour qu'ils soient parfaitement indissociables. Les couleurs flamboyantes appliquées en aplat donnent vie à l'histoire : une dominante de rouge bien sûr, typique au monde du cirque, du jaune d'or, du rose doux, du vert clair de l'orange vif, du bleu dit "charron" ou profond…sans oublier le ciel de nuit étoilé et violet. On sent dans cette BD le travail fait sur le cadrage : Etoile est toujours le sujet principal du cadre. Quant aux autres personnages, ils doivent s'y contraindre, par exemple Constantin le géant doit soit se plier pour entrer dans le cadre ou soit se voir couper en partie.

Cette BD, sortie en mars 2005, a obtenu le prix BD de l'Aube du salon régional du livre pour la jeunesse de Troyes. Les admirateurs du réalisateur Tim Burton se retrouveront forcément dans cette merveilleuse histoire qui est accessible à tous rêveurs et rêveuse, adultes comme enfants.

Pauline Clérin